Et puis il y a les enfants

Oui, il y a les enfants.
On n'en parle pas beaucoup ici, car ils prennent déjà tellement de place dans nos vies, qu'on a souvent besoin de respirer, et ici, c'est un moyen de respirer.
Mais s'ils n'étaient pas là, nous ne parlerions que d'eux, que nous rêverions d'avoir. Je me demande souvent si je serais parvenue à être heureuse sans enfant, et je pense alors à Simone de Beauvoir, et à d'autres encore qui ont parfaitement assumé ce choix, et ont alors transformé ce temps pris ordinairement par les enfants en oeuvre forte et universelle. C'était un temps, pas très ancien, où les femmes étaient acculées à ce choix. 
Aujourd'hui, heureusement, il en est autrement, même si c'est encore difficile de changer les mentalités de certains, faire comprendre que leur éducation, les jeux partagés ne sont pas réservés aux femmes. Le choix n'est plus obligé. J'aurais été bien incapable de le faire.
Désormais ils sont là, et c'est merveilleux de les observer. Ce n'est pas mon oeuvre, je ne les ai pas façonnés, ils le font bien tout seuls. C'est justement cela qui est merveilleux, voir qu'ils sont dissociés de moi-même, qu'ils sont si différents, qu'ils sont vivants à leur façon différente de moi-même, qu'ils vont choisir leur propre chemin.
Je pourrais les observer des heures et des heures, je les trouve extraordinairement beaux et intelligents ! Je mens pas, je vous assure. 
Le temps passé avec eux n'est pas du temps perdu, c'est du temps de vie pure. Je ne dirais pas du temps à donner sans compter, car sinon c'est sans fin, et je veux pouvoir ne pas m'oublier, ce qui n'est pas toujours aisé.
Ces temps-ci, mes enfants me touchent particulièrement, je leur trouve une grâce et des dons hors du commun, même parfois de l'ordre du magique ! Mais je suis aussi extrèmement consciente de leur fragilité, leurs failles possibles, et je me sens investie de la mission écrasante de les protéger du monde. C'est avant de me rappeler que rien n'est plus fort qu'un enfant, si on parvient seulement à préserver ses rêves.