Ma rentrée

Publié le par m

route.jpg
 André Dhôtel se promène dans le paysage

Je trouve qu'il y a une drôle de logique entre les textes qui précèdent, la rentrée, - ce drôle de mouvement -, celui d'être ailleurs comme porté par soi, un peu à coté, les puissances de l'impersonnel, "on", et la petite chambre de l'écrivain philosophe, (Thoreau, à Walden), pour JCD encore, ci-dessous.

Pour faire bonne mesure, le texte est de Miller (Tropique du Capricorne), ainsi qu'une photo-champignon.



"Ainsi passent des moments, de véridiques moments de temps sans espace, de connaissance totale, où je m'effondre sous la voûte du rêve libéré de soi.
Dans les intervalles qui séparent ces moments, dans les interstices de ce rêve, c'est en vain que la vie tente de bâtir : la folle logique de la ville et ses échaffaudages ne sont d'aucun secours. En tant qu'individu, en tant que chair et sang, je me sens chaque jour nivelé un peu plus bas pour ériger la ville désincarnée, sans chair ni sang, dont la perfection est la somme de toute logique et signifie la mort du rêve. Je lutte contre une mort océane où ma propre mort est une goutte d'eau qui s'évapore. Pour élever ma vie individuelle et personnelle, ne serait-ce qu'une fraction de centimètre au-dessus du niveau de cet océan de mort qui sombre, il me faut une foi plus grande que celle de plus grand des prophètes. Il me faut la force et la patience de formuler ce que ne peut exprimer la langue de notre temps, car ce qui est intelligible n'a pas de sens. Mes yeux ne me servent à rien, car ils ne me renvoient que l'image du connu. Mon corps entier doit devenir rayon perpétuel de lumière, se mouvant à une vitesse toujours plus grande, sans répit, sans retour, sans faiblesse. La ville pousse comme un chancre, il me faut pousser comme un soleil. La ville mord de plus en plus profondément dans le rouge, insatiable et pâle vermine condamnée à mourir éventuellement d'inanition.  Et moi je vais affamer cette vermine blanche jusqu'à ce qu'elle en crève. Je vais mourir, en tant que ville, pour renaître en tant qu'homme. Je scelle donc mes oreilles, mes eux, mes lèvres.
Avant de redevenir tout à fait homme, il est probable que j'existerai en tant que parc - sorte de parc naturel où l'on vient se reposer, laisser couler le temps."


henry-miller1.jpg


Concord-MA-Fall-102604-109-Thoreau-Cabin-Walden-Pond.jpg

Publié dans m

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
A
je te remercie de m'avoir fait découvrir André Dhôtel, j'ai beaucoup aimé "Lumineux rentre chez lui"
Répondre
C
Exister en tant que parc, j'aime cette idée. Rêve, vie, interstices, et cela dans la ville sans compassion. C'est tout à fait ça.
Répondre