Les sables émouvants

Publié le par m

emmanuelle-d.jpg

D'abord, bien sûr, y'a comme une histoire de carnation, essentielle, pour deviner la vie organique qui est dessous. Puis le prénom, il me touche, il est l'exact envers du mien, féminin. Ses yeux sont trop clairs, parfois oui, parfois non. Ca change tout le temps, allotropie, protéiforme, couleurs du temps ; il paraît que ça change tout le temps, les couleurs, la lumière, les paupières, les gens. La profondeur et l'émotion à fleur de peau. On dit cela, à fleur de peau, comme si l'on s'apercevait soudain de tous les objets qu'on ignore parce qu'on les connaît trop, puis on les retrouve, on les regarde pour mieux les oublier. Ca marche aussi avec les expression comme d'elle, "à fleur de peau". On sait même plus très bien ce que ça veut dire, on laisse, parce qu'on pense qu'on l'a entendu, quelque part. Et puis on pense à tous les dimanches soirs et combien, encore. On pense qu'elle est fragmentée, mais c'est une actrice qui laisse tous les blancs s'exprimer, ou bien plutôt, qui les exprime. La vie, parfois, les laisse en blanc. Il faut que l'écriture ou la chair les incarne. Peut-être parce qu'il y a comme un double, notre regard et celui de la caméra, que ce double regard emprisonne et libère. Qu'il faut à notre place produire ce genre d'effet pour notre vie. Chacun a ses recettes ; cela peut aussi se déchirer, faire apparaître une autre trame, ou doubler la sienne propre d'effets de voiles. Y'a ça, tout le temps, comme d'un arrière fond d'où elle nous regarde. On se dit qu'elle peut pas être comme ça dans sa vie, puis on se dit que si, qu'elle ne pourrait pas porter ça autrement, devant la caméra. C'est un peu comme une vie rêvée, on repense à la citation difficile du Mépris "Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s'accorde à nos désirs", et on pense l'avoir un peu comprise, une fois de plus. Comme les poèmes de Rimbaud dans une gare éloignée, venteuse, tard. Pourtant c'est un peu ça, le diçible, l'attention, la possibilité que le corps (se) dise et puis les mots portés, différemment, par sa voix. Les mots ne devraient pas cesser d'être dit, d'enregistrer, d'être enregistrés, de passer dans des effets de corps et de voix. Ne pas cesser d'être porté. Le rêve que porte le cinéma : la vérité multipliée par autant de photogrammes, par seconde. Il ne reste plus que son image. Ses yeux, une fois de plus, ont changé.

Publié dans m

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
L
marrant, c'est vraiment l'actrice qui me touche en ce moment.. je ne sais pas si elle me charme, ou me révulse parfois... elle joue! et moi je l'aime, comme on aime parfois se faire bouleverser...
Répondre
A
elle est extra, et même plus
Répondre