L'insoutenable légèreté de l'être

Publié le par Clara

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Lu il y a longtemps, vers vingt ans je crois, ce roman de Kundera avait eu un fort écho en moi. J'avais aussi beaucoup aimé le film : je ne peux désormais plus entendre ce fameux roucoulement de tourterelles au-dessus des toits sans ressentir une vive émotion. 

Voici un extrait résumant la problématique qui me tarabustait alors. Aujourd'hui, je pense que pour pouvoir comprendre sa légèreté, il ne faut pas avoir peur de la pesanteur, car c'est cela être vivant. 


Si chaque seconde de notre vie doit se répéter un nombre infini de fois, nous sommes cloués à l’éternité comme Jésus-Christ à la croix. Cette idée est atroce. Dans le monde de l’éternel retour, chaque geste porte le poids d’une insoutenable responsabilité. C’est ce qui faisait dire à Nietzsche que l’idée de l’éternel retour est le plus lourd fardeau (das schwerste Gewicht).
 

Si l’éternel retour est le plus lourd fardeau, nos vies, sur cette toile de fond, peuvent apparaître dans toute leur splendide légèreté. 

Mais la pesanteur est-elle vraiment atroce et belle la légèreté ? 

Le plus lourd fardeau nous écrase, nous fait ployer sous lui, nous presse contre le sol. Mais dans la poésie amoureuse de tous les siècles, la femme désire recevoir le fardeau du corps mâle. Le plus lourd fardeau est donc en même temps l’image du plus intense accomplissement vital. Plus lourd est le fardeau, plus notre vie est proche de la terre, et plus elle est réelle et vraie. 

En revanche, l’absence totale de fardeau fait que l’être humain devient plus léger que l’air, qu’il s’envole, qu’il s’éloigne de la terre, de l’être terrestre, qu’il n’est plus qu’à demi réel et que ses mouvements sont aussi libres qu’insignifiants. 

Alors, que choisir ? La pesanteur ou la légèreté ? 

C’est la question que s’est posée Parménide au VIe siècle avant Jésus-Christ. Selon lui, l’univers est divisé en couples de contraires : la lumière-l’obscurité ; l’épais-le fin ; le chaud-le froid ; l’être-le nonêtre. Il considérait qu’un des pôles de la contradiction est positif (le clair, le chaud, le fin, l’être), l’autre négatif. Cette division en pôles positif et négatif peut nous paraître d’une puérile facilité. Sauf dans un cas qu’est-ce qui est positif, la pesanteur ou la légèreté ? 

Parménide répondait : le léger est positif, le lourd est négatif. Avait-il ou non raison ? C’est la question. Une seule chose est certaine. La contradiction lourd-léger est la plus mystérieuse et la plus ambiguë de toutes les contradictions.

Publié dans Clara

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A
de toute façon je n'aime que le fromage
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C
Et puis on peut ne désirer que l'amour de l'autre sans autre revendication. Il faut peut-être faire  là la différence entre aimer et être amoureux. On peut aimer sans retour, comme on aime l'humanité par exemple. Mais être amoureux sans retour, c'est terriblement douloureux. Ou masochiste.
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A
ah, ok, d'accord
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L
pardon "cherché".. ben moi je n'en sais rien, Clara, tu sais, je ne suis qu'une fille.. et évidemment que je pense comme toi.
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C
Quelque chose me paraît trop simpliste là-dedans... Aimer sans désirer l'amour de l'autre, si l'autre n'est pas un pur esprit, est-ce toujours aimer ?
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